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Comptines & Compagnie
 
Album pour les grands
Champion
souligne

Gilles Rapaport
Éd. Circonflexe, octobre 2005
13 €


Voici l’histoire de YoungPerez, qui conquit à vingt ans le titre de champion du monde deboxe, catégorie poids mouche, à Paris en 1931. Venu deTunis, alors protectorat français, pour poursuivre sacarrière de boxeur professionnel en France, il livra 133combats, en gagna 92 et en perdit 26. Le 21 septembre 1943, il estarrêté comme juif et emprisonné à Drancy,d’où il part le 7 octobre 1943 dans le convoi n° 60 endirection d’Auschwitz. Il est abattu le 22 janvier 1945, pendant laMarche de la mort.

Champion nous raconte un bref, mais pourtant interminablemoment, au coeur de ces quinze mois de détention de Young Perez,celui d’un combat sur la grande place de Buna à Auschwitz le 31octobre 1943. Un étrange et abominable combat contre un « géant nazi... un tueur de squelettes ». Un combat pour l’unique plaisir pervers de ses geôliers.Un duel qui, comme la vie au camp, ne répond plus àaucune des règles qui régissent la vie entre les hommes.Une lutte à mort entre un détenu juif poids mouche et sonbourreau nazi poids lourd. Un combat, enfin, où tous les coupssont permis et encouragés. Alors qu’il se bat pour sa vie, Youngrepense à son existence d’avant, au soleil de Tunis, àl’amour et à la peur de sa mère. À cette vie degloire qui, croyait-il, le protégerait de la haine. Alors qu’ilse bat pour sa dignité, Gilles Rapaport s’adresse à luiet aux spectateurs impuissants de cet ignoble corps à corps,au-delà des années, des souffrances et des morts :« Frappe, Young ! Frappe ! Frappe !Frappe pour Michel, gazé à 2 ans !Frappe pour Adèle, assassinée à 90 ans !Je t’en supplie, Young, frappe-le encore.Que tes poings vengent les morts !Que ces coups effacent leurs souffrances !  »Cette supplique, plus que tout le reste, atteint le coeur du lecteur etheurte sa conscience. Elle lui rappelle la réalitéhumaine de la Shoah : les enfants et les vieillards assassinés,mais aussi la violence qui appelle la violence. Ces mots sontdérangeants dans un « livre pour enfants », maispourtant comment faire autrement ? Comment, et pourquoi surtout, leurcacher que parfois la souffrance appelle la vengeance, au moins sonexpression dans les mots, vaine consolation. Cette question est aucoeur de cet extraordinaire album, qui en cela va plus loin encore quele très beau Grand-pèredu même auteur. Cette question, c’est celle de lafrontière entre la violence « légitime »– celle du combat de boxe lorsqu’il obéit auxrègles de l’art, à la loi des hommes – et laviolence effarante, perverse et gratuite qui ne répond plusqu’au plaisir de ceux qui l’exercent. Violences qui sont toutes deux lefait d’êtres appartenant à la même espècehumaine.

Il y aurait tant à dire sur ce livre : ses couleurs de nuit sansfin éclaboussées de neige, les traits de pinceauxépais qui deviennent tâches quand les coups explosent, lascansion et la beauté du texte... qu’en rendre compte enquelques lignes est déjà une trahison. C’est donc, commetous les autres dont Comptines vous propose la lecture, mais plusencore que tous les autres : un livre à lire absolument.

par Ariane Tapinos
PS :

À lire également, du même auteur : Grand-père(éd. Circonflexe, juillet 2005, 13 €) et sur le destin d’unautre boxeur déporté, le très beau et trèsdur roman de Jean-Jacques Grieff, Le Ring de la mort (éd. L’École des Loisirs, coll. Médium, mars 2003, 207 pages, 7,30 €)

Date de publication de l'article : samedi 11 février 2006.

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