Roman jeune lecteur

Les Mille Oiseaux de Sadako

Article rédigé par Corinne Chiaradia

Eleanor Coerr (texte) et Marc Daniau (ill.)Traduit de l’américain par Frédérique FraisseÉd. Milan, coll. Poche cadet, Ici et là-bas, [1977] 2003, 80 pages5,5 €

L’histoire et le nom de Sasaki Sadako, morte le 25 octobre 1955 d’une leucémie (« la maladie de la bombe ») a traversé les frontières et le temps, comme un symbole de courage, d’espoir et d’innocence. En 1958, dans le parc de la Paix à Hiroshima, un monument a été élevé à la jeune fille aux mille oiseaux, une statue régulièrement fleurie de grues en papier et de messages de paix. Son histoire a trouvé encore un prolongement dans le livre "Je fais un oiseaux pour la paix" (éd. Rue du monde, 2005).Née en 1943, Sadako Sasaki était encore bébé quand éclata le "pikadon" au-dessus d’Hiroshima. Mais elle habitait là, avec sa famille. Neuf ans après la fin de la guerre, Sadako, vive comme l’air, aime les jeux et les courses contre le vent. Pour elle le 6 août, jour de rassemblement et de cérémonies à Hiroshima, a moins le goût du recueillement que celui de la barbe à papa et des feux d’artifices... Pourtant, comme beaucoup d’autres "rescapés", Sadako tombe malade. Le verdict des médecins l’effraie, la révolte ("Pourquoi moi, puisque la bombe ne m’a même pas égratignée ?"). Elle doit pourtant se plier aux séjours à l’hôpital et affronter la douleur croissante. Pour occuper le temps et nourrir ses rêves, Sadako se met à confectionner des grues en papier. Selon une légende japonaise ces oiseaux peuvent vivre mille ans et si une personne malade en plie mille, les dieux la guériront. Alors Sadako plie des dizaines et des dizaines de grues, qu’elle accroche au plafond de sa chambre d’hôpital. Ses amis, ses parents, ses camarades d’école lui apportent des papiers, de toutes origines et de toutes couleurs. Quand Sadako meurt, elle a plié 644 oiseaux multicolores : ses camarades réaliseront les 356 "manquants" afin qu’elle soit enterrée accompagnée de ses mille oiseaux. Ils feront également publier les lettres que Sadako leur adressait depuis son lit : le livre, intitulé Kokeshi fera le tour du Japon.Avec des mots simples et touchants, l’américaine Eleanor Coerr réécrit l’histoire de la dernière année de Sadako. Sans larmoiement ni angélisme, elle fait revivre l’adolescente vive, rieuse, puis sa peur, ses doutes et ses rêves de papier. Une écriture directe mais pudique, des illustrations très colorées où le rouge est omniprésent, l’histoire belle et triste de Sadako est à lire dès neuf ans.