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Pièce à trois personnages… et autant d’ours (invisibles).
En Alberta, province du Canada, il peut arriver de croiser un ours. Ily a même des manuels édités pour expliquer comments’en débarrasser, éloigner la bête, lui fairecroire qu’on est mort ou la chasser. Mais que faire quandl’ours en question est blanc et transparent, qu’il voussuit docilement tel un ange gardien et écoute vos histoires ?Voilà ce qui arrive à Louise Wing, onze ans, à sasœur ainée Elinor et à leur père, Ian. Saufque Louise est la seule à voir les ours. Passe encore pour lesien, mais quand chaque habitant de la petite ville de Banff estbientôt accompagné d’un plantigrade fantôme,la fillette émerveillée ne peut s’empêcherd’en parler. Elinor en rit (elle baptise sa sœur « ma petite folle préférée »), son père aimerait y croire, quant auxautres… Les rêves de Louise sont propres à exciterle chef de la milice anti-ours, aussi assoiffé du sang del’animal que les poux dont toute la famille Wing estaccablée.

Trop souvent (à mon goût) le théâtre jeunessenous livre des « pièces à thèmes » enforme d’exutoires aux problèmes contemporains, histoired’expliquer aux ados le monde comme il va (mal). Voilà unepièce qui tranche par son ton, empruntd’étrangeté, d’humour et de beaucoup detendresse envers cette singulière famille – unpère-poule et ses filles délurées oudélirantes, selon comment l’on interprètel’histoire. N’allez pas croire qu’il s’agitd’un plaidoyer pour les ours et regarder du côté desPyrénées. Sans didactisme, le regard bienveillant deKarin Serres porte bien plus loin, au-delà del’Atlantique, et plus profond dans les mystère ducœur de Louise et des fantasmes que la bête, toujours et detous temps, déclenche chez les hommes.